LES CHATS PERCHES DE SAINT CIRQ: Bail emphytéotique

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mercredi 15 avril 2015

Bail emphytéotique

Quelques précisions sur le projet porté à l'ordre du jour ...

Le bail emphytéotique ou emphytéose (du grec ἐμφύτευσις emphuteusis, « action de planter ») est un bail immobilier de très longue durée, le plus souvent 99 ans, qui confère au preneur un droit réel sur la chose donnée à bail, à charge pour lui d’améliorer le fonds et de payer un loyer modique, les améliorations bénéficiant au bailleur en fin de bail sans que ce dernier ait à indemniser le locataire (appelé emphytéote).
La situation des parties, dans un bail emphytéotique, est particulière puisque l’emphytéote se voit reconnaître un droit réel sur le bien qui lui est donné à bail. L’emphytéote est un quasi-propriétaire du bien qui lui est donné à bail.

En France
Le bail emphytéotique trouve son origine directement dans le droit romain.
L’emphytéose était, à Rome, un droit réel de jouissance appelé jus emphyteuticum et conféré sur un bien appartenant à autrui ; elle ne s’établissait que sur les propriétés rurales, moyennant le versement d’une redevance périodique, appelée canon.
L’objet du contrat d’emphytéose était de permettre aux propriétaires de grands domaines fonciers, souvent mal cultivés, d’assurer la mise en valeur de leurs terres sans en supporter les charges : exécution de travaux importants pour mettre en culture des terres en friche, transformation profonde du mode d’exploitation de terres cultivées, construction de bâtiments d’exploitation.
Le bail emphytéotique est régi en France par les articles L. 451-1 à L. 451-12 du Code rural et de la pêche maritime. Le régime des baux à construction et baux à réhabilitation est inspiré de celui du bail emphytéotique.

Objet
Le bail emphytéotique avait été à l’origine conçu pour la mise en valeur et l’entretien de grands espaces ruraux, mais il a vu son cadre d’application s’étendre à toutes sortes de biens immobiliers et s’applique donc aujourd’hui aux immeubles à usage industriel ou commercial, au même titre qu’aux immeubles agricoles ou d’habitation.

Durée du bail
Le bail emphytéotique doit être consenti pour une durée comprise entre 18 et 99 ans en droit français ; il ne peut contenir aucune clause permettant un dénouement avant l’écoulement de cette durée. Si le bail est d’une durée supérieure à 99 ans, la limite extrême du bail doit alors être ramenée à la limite extrême prévue par la loi, soit 99 ans. Et ce du fait de la règle d'interdiction des engagements perpétuels.
Au terme du bail emphytéotique, l’emphytéote devient occupant sans droit ni titre et doit alors quitter les lieux, sauf la possibilité pour lui de se faire consentir une nouvelle location. Aucune tacite reconduction de ce type de contrat n’est possible.

Situation du propriétaire
Le bailleur peut obtenir la résiliation judiciaire du bail emphytéotique, en cas d’inexécution des conditions du contrat ou si l’emphytéote a commis sur le fonds des détériorations graves.
Si l’emphytéote réalise des constructions ou des améliorations, le propriétaire en profite, à la fin du bail, sans avoir à verser d’indemnité au locataire sortant : rien n’interdit cependant de prévoir que le bailleur recevra les constructions et améliorations réalisées par l’emphytéote à charge de verser à celui-ci une indemnité.
Le bailleur peut également vendre les droits qu’il tient du bail emphytéotique.

Situation de l’emphytéote
L’emphytéote est tenu des obligations incombant à tout locataire. Ces obligations sont cependant adaptées au bail emphytéotique, à savoir :
  • il ne peut se libérer du paiement de la redevance, ni se soustraire à l’exécution des conditions du bail emphytéotique en délaissant le fonds ;
  • il doit s’abstenir de faire tout acte ou tout changement qui pourrait détériorer le bien ;
  • il est tenu de toutes les contributions et charges du fonds qui lui est loué. Il est redevable de la taxe foncière grevant l’immeuble donné à bail ;
  • il est tenu d'effectuer, sur les constructions existant au jour de la conclusion du bail, toutes réparations de toute nature. Il n’est cependant pas tenu de reconstruire les bâtiments s’il rapporte la preuve que ceux-ci ont été détruits par cas fortuit, par force majeure ou par suite d’un vice de construction antérieur au bail ;
  • il répond de l’incendie au même titre que tout locataire.


Un locataire quasi-propriétaire
Le bail emphytéotique confère au preneur un droit réel immobilier ; l’emphytéote est donc investi de prérogatives beaucoup plus larges que celles dont bénéficie un locataire ordinaire. Il jouit ainsi des pouvoirs suivants, propres à sa situation d’emphytéote :
  • possibilité d’améliorer le fonds : si l’emphytéote doit généralement améliorer le fonds, il n’est tenu de faire que les améliorations qui ont été prévues par le bail. L’emphytéose implique également la liberté pour le preneur de réaliser tous travaux de construction et de démolition sans le consentement du bailleur ;
  • liberté d’hypothéquer : l’emphytéote peut librement hypothéquer son droit ; ce droit peut être saisi comme tout bien immobilier ;
  • droit de chasse et de pêche : l’emphytéote a seul le droit de chasse et de pêche ;
  • mines, carrières et tourbières : l’emphytéote ne peut pas ouvrir de nouvelle mine ou carrière sans l’autorisation du propriétaire, mais peut néanmoins continuer l’exploitation des mines et carrières existantes ;
  • liberté de louer et de sous-louer : l’emphytéote peut donner à bail les immeubles qu’il édifie. Il peut également sous-louer les immeubles qu’il a pris à bail emphytéotique. Le bail emphytéotique ne peut par conséquent contenir aucune clause interdisant, limitant ou réglementant le droit de louer ou de sous-louer de l’emphytéote ;
  • liberté de consentir une servitude passive et d’acquérir une servitude active ;
  • conclusion d’une « sous-emphytéose » : l’emphytéote ne peut pas vendre le terrain ou l’immeuble objet de son emphytéose ; par conséquent, il ne peut pas consentir lui-même de bail emphytéotique sur le bien qu’il tient déjà lui-même à bail emphytéotique : il doit exercer personnellement son droit d’emphytéose ou le céder.
Droit d’exploitation
L’emphytéote dispose d’une grande liberté pour exploiter ou transformer le fonds loué, puisque le bail emphytéotique lui confèrera des droits réels immobiliers analogues à ceux d’un propriétaire. Il peut ainsi exploiter le fonds lui-même ou par l’intermédiaire d’un tiers (locataire-gérant, fermier, locataire).

Canon emphytéotique
L’une des particularités du bail emphytéotique tient à la redevance due par l’emphytéote au bailleur, appelée « canon emphytéotique ». Le montant du loyer du bail emphytéotique est une source de controverse, celle-ci partant de l’idée traditionnelle selon laquelle le canon emphytéotique doit être modeste, voire symbolique.
La loi ne comporte aucune disposition relative à la fixation du montant du canon emphytéotique mais en pratique il est peu élevé lorsqu’une clause du contrat oblige l’emphytéote à apporter des améliorations au fond. On considère cependant aujourd’hui que le bail emphytéotique est un mode particulier d’exploitation d’un bien, à égalité avec le bail commercial et le bail rural.
Le canon est payé par le preneur de façon périodique, généralement par annuités. Les parties sont entièrement libres de convenir à leur guise des modalités du paiement. Il n’existe pas d’obstacle de principe à ce que le loyer soit versé pour partie à la signature du bail et le surplus sous forme de redevances périodiques.

Bail emphytéotique administratif
Le bail emphytéotique administratif (BEA) était réservé à l'origine aux seules collectivités territoriales et aux établissements publics de santé. Depuis la loi n° 2010-853 du 23 juillet 2010, article 11, ils peuvent aussi se conclure sur le domaine public de l’État, mais uniquement pour les biens dont la gestion est concédée aux chambres de commerce et d'industrie (11e alinéa de l'art 710-1 du code de commerce), aux chambres des métiers ( 2e alinéa de l'art 5-1 du code de l'artisanat), aux chambres d'agriculture ( art L510-1 du code rural et de la pêche maritime).

L'article L-1311-2 du code général des collectivités territoriales définit le bail emphytéotique administratif comme un type de bail de longue durée destiné à permettre à une collectivité territoriale propriétaire d’un bien immobilier de le louer à un tiers qui pourra y construire un ouvrage et l'utiliser pendant la durée de ce bail, compris entre 18 et 99 ans, sans devoir assumer le coût financier du terrain.

Cette spécificité juridique autorise une collectivité à utiliser ce type de bail locatif dans le but de permettre :
  • l'accomplissement d’une mission de service public ;
  • la réalisation d’une opération d’intérêt général relevant de sa compétence ;
  • jusqu’au 31 décembre 2013, la réalisation d'opération d’intérêt général liée aux besoins de la justice, de la police ou de la gendarmerie nationale, ou d’un établissement public de santé, ou encore d’une structure de coopération sanitaire dotée de la personnalité morale publique ;
  • jusqu’au 31 décembre 2013, pour la réalisation d’une opération d’intérêt général liée aux besoins d’un service départemental d'incendie et de secours.


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Et l'avis du Sénat :  


Question écrite n° 01654 de M. Jean-Pierre Plancade (Haute-Garonne - RDSE)

publiée dans le JO Sénat du 01/08/2002 - page 1777

M. Jean-Pierre Plancade souhaite appeller l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales sur certains aspects du domaine privé des collectivités locales. Aussi, le prie-t-il de bien vouloir non seulement lui préciser : d'une part, si une collectivité locale peut conclure sur son domaine privé un bail emphytéotique régi par les articles L. 451 et suivants du code rural et, d'autre part, si elle peut conclure ce type de bail en tant que preneuse et non pas en tant que bailleresse.


Réponse du Ministère de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales

publiée dans le JO Sénat du 16/01/2003 - page 190

Les collectivités territoriales ont la faculté de consentir des baux emphytéotiques sur leur domaine privé sur le fondement, non seulement de l'article L. 451-1 du code rural mais également des articles L. 1311-2 et suivants du code général des collectivités territoriales. Le choix de recourir à de tels baux, selon qu'ils relèvent des dispositions du premier code ou du second, se fait en fonction de l'objet même du bail. Ainsi, lorsque celui-ci est conclu en vue de l'accomplissement d'une mission de service public ou d'une opération d'intérêt général relevant de la compétence de la collectivité, ce ne peut être qu'un bail emphytéotique administratif, consenti au titre du code général des collectivités territoriales. En effet, la Haute Assemblée (CE 6 mai 1985, Association Eurolat - Crédit foncier de France) a considéré que, dans une telle hypothèse, le terrain objet du bail, bien qu'appartenant à l'origine au domaine privé, est appelé, compte tenu de son affectation future, à relever du domaine public et ne peut par conséquent faire l'objet d'un bail emphytéotique, dit de droit commun, tel que défini à l'article L. 451-1 du code rural. L'article L. 1311-2 du code général des collectivités territoriales pose cependant un certain nombre de conditions, portant notamment sur la qualité du bailleur et celle du preneur : le bailleur ne peut être qu'une collectivité territoriale alors que le preneur doit être exclusivement une personne privée, excluant de fait qu'une commune puisse être preneuse. En revanche, les dispositions de l'article L. 451-1 du code rural s'appliquent, sans condition, dès lors que le terrain appartient au domaine privé de la commune et est appelé à y demeurer.






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